Troisième Face donne carte blanche au trompettiste Adrien Dumont pour une création au Taquin. Quelle a été ta première idée et t’y es-tu tenu ?

En ce moment, je joue surtout du jazz et j’ai une affinité particulière pour les formats sans harmonie. Mais je trouve qu’un concert de samedi soir au Taquin, connaissant bien le lieu, doit donner envie de danser, de faire la fête. Alors quoi de mieux qu’une soirée autour de la musique funk pour allier musique dansante avec mes goûts musicaux ? J’ai donc décidé de reprendre la musique du groupe Lettuce qui est pour moi un des groupes actuels dans l’univers du funk qui a su moderniser cette musique tout en respectant la tradition.

J’ai choisi, pour relever ce défi, de retrouver mes complices de longue date, avec qui j’ai l’habitude de travailler, que j’admire, qui m’inspirent, ce qui me permet de me lancer dans l’aventure en toute confiance. Mais aussi de jouer avec des membres du collectif que je connais un peu moins bien mais en qui j’ai totale confiance également. Voilà ce sera une soirée funk, joyeuse et dansante qui pourra s’adresser à ceux qui veulent taper du pied et se déhancher comme ceux qui veulent juste écouter et passer un bon moment musical.

Tu es membre de Troisième Face depuis longtemps et tu as joué au Taquin dans plusieurs formations. Mais c’est ta première carte blanche. Est-ce un événement pour toi ?

Appartenir au collectif Troisième Face représente plusieurs choses à mes yeux. D’une part, je me reconnais auprès d’artistes qui ont une vision similaire de la musique, une même approche « sociale ». Ni une musique de niche, ni une musique commerciale. On se retrouve autour du même intérêt par rapport à la musique de création, une envie de bien faire et d’être force de proposition artistique. On s’adresse donc à un public sensible à cela et nous nous produisons logiquement dans des lieux qui permettent à cette branche de la musique d’exister. Quant au Taquin, je suis honoré d’une carte blanche dans ce club de jazz historique. Une des rares salles de la ville où je me sens comme à la maison, où je trouve une telle chaleur humaine. J’ai envie que cette soirée soit belle, de montrer par mon travail tout le respect que j’éprouve pour ce lieu. Nous préparons une « funky party » qui apportera la fête.

Tu es trompettiste. Comment se situe ton instrument dans l’univers funk ?

Le premier enjeu pour moi c’est de faire en sorte que la section cuivre (en l’occurrence trompette/sax) fasse bloc le plus possible: « Tu n’es plus un individu mais une unité, dans les intentions et dans l’exécution ». Les sons se mélangent et se complètent. Le funk est basé sur les rythmes et sur les sons qui créent le groove et donnent envie de bouger. Et je veux rappeler que le premier paradigme de notre création est évidemment le jeu collectif, jouer ensemble.

Les musiciens du groupe dont je t’ai parlé, Lettuce, ont introduit l’utilisation des effets, qui permettent de travailler le son des instruments pour créer des textures. Or je suis passionné par les effets parallèlement au travail de l’instrument et il en va de même pour les autres musiciens et musiciennes du groupe. Dans le funk, comme dans toutes les musiques où l’improvisation est à l’honneur, le discours improvisé est codifié. En ayant connaissance de cela, nous avons une grande liberté pour nous affranchir de ces codes tout en respectant le style. Un terrain de jeu, d’expression et d’interaction s’ouvre donc à nous. Une carte blanche dans un lieu comme le Taquin est un honneur particulier et nous y mettrons tout notre cœur pour produire un concert qui saura remuer la salle.